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Sur la route des 4000

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23 juin 2015

SUR LA ROUTE DES 4000. Une invitation au voyage sur les plus hauts sommets des Alpes.

Dans cet ouvrage, paru aux Editions Vandelle, vous retrouverez tous les moments riches en émotions et en sensations de cette expédition. Vous découvrirez également quelques petites envolées philosophiques sur la beauté, la passion, la responsabilité, le temps, etc,...

Et vous, quel projet ambitieux et réaliste pourriez vous imaginer avec vos talents et vos passions ?

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18 juin 2008

FAIRE LA TRACE

Ce livre est en librairie depuis le 13 juin et sur amazone.fr

Apprentissage de la solitude dans la prise de décision, responsabilités humaines en situation critique, recherche simultanée de la performance et de l’économie d’énergie : le parallèle est frappant, entre le guide de montagne qui doit « faire la trace » pour les autres, et le manager qui cherche à diriger son équipe vers des objectifs communs. La haute montagne est une formidable école de management.

Dans ce livre, Rémi Engelbrecht met à profit sa double expérience de guide et de consultant pour décrire, dans un langage concret et opérationnel qui va bien au-delà de la seule métaphore, les fondamentaux du métier de manager d’équipe.

Chacun des sept chapitres s’ouvre sur le récit d’une aventure en haute montagne – qui mènera le lecteur d’une première course à l’aiguille du Chardonnet jusqu’à l’ascension du Mont-Blanc sous la tempête – dont l’auteur tire de précieux enseignements et des principes d’action. Savoir « être en projet » avec son équipe, fixer les objectifs, utiliser son intelligence émotionnelle pour développer l’intelligence collective, aider les autres à trouver les solutions par eux-mêmes : autant de « leçons de montagne » ainsi déclinées en problématiques concrètes pour le manager. Chaque chapitre se termine par l’apport d’un outil pratique d’aide au management, mis à l’épreuve par l’auteur et applicable en entreprise.

Ce livre, véritable source de conseils, propose au manager de s’enrichir de l’expérience du guide de montagne, puisque ces deux métiers ont une vocation commune : prendre soin des autres pour les faire réussir.

10 septembre 2007

épilogue(s)

Copie_de_Guides_affam_s_de_4000___Le_Couvercle_117

Michel et moi avons gravi nos derniers sommets en aout, encordés à de nouveaux compagnons car nous n'étions plus disponibles en même temps. Nous verrons si l'automne nous donnera l'occasion de partir encore pour quelques sommets. Pas sûr du tout. Finir la série en 2008 ? Peut être.

Merci en tous cas à tous ceux avec qui nous avons partagé notre voyage sur la route des 4000, en contact numérique sur ce blog ou en contact digital au hasard de nos renontres

A défaut d'objectif chiffré nous avons réalisé notre objectif plaisir.

Un éditeur m'a donné son accord de principe pour que vous trouviez un souvenir écrit de ce périple dans un livre, à paraitre début 2008.

En voici quelques titres de chapitres pour vous faire cogiter :

  • J’aurais voulu être un artiste !!!!!!!!!!

  • Un long dimanche en Normandie.

  • Et moi émois !

  • L’exploit de Blodig et la liste des 82 sommets.

  • J0 :  jour zéro.

  • Faire la trace.

  • La première gorgée de bière…et toutes les autres.

  • Sur le fil des 4000.

  • Sur le fil du rasoir

  • Souffler, roter, péter, cracher, baver, grogner, renifler, ougner.

  • Athlétique et fine dentelle.

  • De l’âge du Fer à l’âge du Hêtre.

  • Genoux, cailloux, pissoux, grisoux, filoux et cépatoux.

  • Extrême concentration..

  • Comme un air de tango.

  • Souvenir d’enfance.

  • Encordons nous !

  • Les coulisses de l‘exploit

  • Montres moi ton sac, je te dirai comment tu grimpes

  • Coup de blues à nothing blue

  • L’accompagnatrice

  • 6 aout : 67 sommets sur la route des 4000.

Tout un programme !! J'ai hâte de partager cela avec vous

21 août 2007

19/08/07 face nord de Bionnasay 3 H30! et deux 4000 de plus

DSC00201 je vous raconterai un peu plus loin cette ascension éclair mais je voudrai revenir un peu en arrière... Mars 2007, nous sommes avec Rémi dans nos derniers préparatifs... je fais mes dernières visites médicales en particulier à Joseph O et Edwige sa femme 88 et 85 ans! Comme toujours Joseph blague, chahute Edwige qui lui répond, 70 ans de vie commune et toujours à jouer à "je t'aime moi non plus". Et puis je leur explique que je vais être absent pour partir en montagne - 4 mois sur "la Route des 4000". Et là le regard si rieur et malicieux de mon vieux Sarde préféré s'assombri - "mais Dr on ne va plus vous revoir!" et moi de répondre - "ba,ba y a pas de raison vous êtes encore bien solides tous les deux" mais lui il n'y croyait pas, alors main gauche sur l'épaule, main droite qu'il ne voulait plus lâcher il m'a dit adieu les larmes aux yeux... Hier midi encore tout plein de souvenier de la veille, je l'ai revu le vieux Joseph mais pas chez lui, à l'hôpital, à la mi avril il a fait un accident vasculaire cérébral, lui si bavard (pire que moi) est devenu quasi aphasique, il ne barraguine plus que quelques mots de vieux sarde imcompréhensible... Mais il m'a reconnu et s'est mis à pleurer. C'est de sa main gauche qu'il ma tenu, la droite il ne la commande plus... Voilà, je sais que cela n'a rien à voir avec la montagne, mais cela a à voir avec ma vie. Avec Rémi on s'est fait une petite pause égoiste sur les 4000, une parenthèse enchantée que je souhaite à tous, je sais bien que même si je n'étais pas parti dans cette aventure cela n'aurai rien changé pour Joseph et Ewige ou pour Josy et son combat pour la vie et tous les autres ...Mais je tiens à les remercier de leur confiance et encouragements malgré leurs épreuves non choisies... La parenthèse est finie, le travail à repris, il reste les week end pour s'évader, alors avec Hubert, médecin, jusqu'au boutiste, grand sportif (plusieurs triathlon d'Embun, premier des vétérans, 52 ème au scratch) on s'est fait une petite face Nord éclair que l'on a prolongée jusqu'au dôme du Goûter (4300M) dans un brouillard à couper au couteau. Puis on est resdescendu par le refuge du Goûter, car avec la crasse ambiante, prolonger au mont Blanc n'était pas raisonnable. J'en suis donc à 64 4000, il m'en reste 18, je ne pourrai probablement pas finir ce projet dans l'année et... ce n'est vraiment pas grave, j'ai d'autres visites à faire...
8 août 2007

suites et fin...? 67 sommets sur la route des 4000

Notre voyage sur la route des 4000 se termine aujourd’hui. Et en beauté !

Les 5 et 6 aout, en trentes heures d'effort, j’ai gravi 11 sommets de 4000 à la suite.

Finalement ce sont donc 67 sommets de 4000 mètres gravis en 126 jours, soit un sommet tous les deux jours environ. Pas si mal avec cette météo 2007 franchement mauvaise.

100  % de succès pour chacun des sommets tentés.

...Et (presque) pas une blessure...

Dimanche 6 août, 4 heures du matin. Nous quittons le refuge des Cosmique pour descendre à vive allure le glacier de la vallée blanche. Une demi lune généreuse nous éclaire le passage à travers les crevasses.

5 heures du matin : après avoir contourné l’immense cathédrale de granit du grand Capucin et remonter la mystérieuse combe Maudite, nous nous retrouvons à la base d’un long couloir de neige, de glace et de roches. La lune est cachée par la paroi qui nous surplombe et, dans l’obscurité, nous espérons ne pas nous engager dans une voie sans issue.

6 heures : le jour s’est levé et nous a confirmé que nous étions sur la bonne voie. Au dessus de nos têtes nous devinons les premiers rayons du soleil qui arrivent derrière une arête de neige. Plus haut encore, notre objectif de la journée se découvre : les aiguilles du Diable s’embrasent littéralement, leur granit doré illuminé par le soleil rasant. J’ai rarement vu des flammes de pierre aussi élancées et aussi tourmentées. Chacune des cinq aiguilles que nous allons gravir aujourd’hui mesure une centaine de mètres d haut.

8 heures : après avoir escaladé la corne du Diable nous sommes déjà  au sommet de la pointe Chaubert. Les passages sont impressionnants par leur verticalité et les 700 mètres de vide qui se creusent au dessous de nos pieds. Mais à chaque fois des fissures, des arêtes ou des feuillets généreux nous procurent de superbes prises d’escale qui facilitent notre progression.

9 heures : après une descente en rappel vertigineuse sur notre corde accrochée à deux fins anneaux de sangle nous avons atteint une brèche entre l’aiguille Chaubert et la pointe Médiane, notre troisième 4000 de la journée. Puis nous avons atteint le sommet de la pointe Carmen à  4109 mètres de haut. Nous progressons désormais comme à l’intérieur des arches sommitales d’une immense cathédrale ; les pointes rocheuses sont de plus en plus fines et aériennes, nous nous faufilons dans des ouvertures naturelles au milieu d’immenses dalles de granit.

11 heures : le crux de la journée nous laisse perplexe. Nous pensons avoir raté le bon itinéraire. Nous sommes au pied de la dernière aiguille de la journée, l’Isolée. Sur notre droite la face nord toute sombre et sauvage plonge de 700 mètres vers la combe maudite. Au dessus de nos têtes un mur lisse et sans prise nous donne le vertige. Le seul passage est donc sans doute en traversé à gauche. Mais le rocher est lisse, dépourvu de prises, recouvert en partie de neige. Seul en vieux piton métallique qui doit dater des années 50 nous invite à tenter une traversée. Quinze mètres plus haut une sangle en nylon est une deuxième invitation à nous élancer. Michel part en tête après avoir enfilé des chaussons d’escalade à semelle souple et adhérente. Une longue hésitation lui permet d’imaginer le seul enchaînement de geste qui semble autoriser le passage. J’arête de faire des photos pour bien l’assurer. Il passe, plonge une main derrière un bosse de granit…et retrouve un deuxième piton protecteur. Le passage vers le sommet est franchit. Quand vient mon tour de passer avec mes grosses chaussures d’alpinisme je repense à la hardiesse du guide Armand Charlet qui réalisa la première ascension de ces aiguilles, avec client et sans pitons,  presque 79 ans jour pour jour avant nous, le 4 août 1928. A cette époque on s’assurait avec de raides cordes en chanvre, simplement passée autour des hanches !

Après avoir redescendu ce morceau de bravoure en rappel il ne nous reste plus qu’à remonter des pentes mixtes faciles en neige et roche pour atteindre le sommet du très populaire Mont Blanc du Tacul (ou tape cul comme disent certains, harassés par l’altitude de ce sommet !). Il est 14 heures et le sommet est presque désert à cette heure ci. Nous plongeons alors sur le sentier tailler dans la neige et la glace et rejoignons en longues enjambées les abords du refuge des cosmiques, six cent mètres plus bas.

Il se passe alors un fait à la fois anodin et très fort : Michel et moi nous nous séparons pour suivre deux itinéraires différents. Michel part seul rejoindre le sommet de l’aiguille du Midi et le téléphérique du même nom pour rejoindre Chamonix où demain une liste de rendez vous l’attend dans son cabinet médical. Pour ma part je rejoins le refuge des Cosmiques. En effet, demain je compte enchaîner cinq autres sommets avec un nouveau compagnon. Alexis Profit est un jeune montagnard de 17 ans qui travaille pour un mois au refuge. Entre ménages, vaisselles et rangement il n’a pas pu profiter des sommets alentours. Mais il compte sur la gentillesse de la gardienne Laurence pour obtenir 1 ou deux jours de congés et partir avec moi. A 18 heures il vient me retrouver alors que je contemple le couché de soleil sur la terrasse : c’est d’accord j’ai deux jours !

Lundi 7 aout, 1 heure du matin

C’est reparti ; horrible réveil enfiévré après une nuit courte où je n’ai pas trouvé le sommeil malgré le génépi qui couronna hier soir tard la vaisselle avec l’équipe du refuge et quelques guides sympathiques. Je prends mon temps car nous partirons une fois qu’Alexis aura fini de servir les petits déjeuners des 70 candidats du jour à l’ascension du Mont-blanc. Vers 2 heures trente nous quittons le refuge. La même lune qu’hier nous accompagne. Alexis, comme un fauve trop longtemps tenu en cage, passe subrepticement devant moi. La corde se tend, … je me sens comme légèrement tiré vers le haut… Et c’est à la vitesse d’un TGV  que nous remontons les pentes du Mont Blanc du Tacul. Entre chaque passage de crevasses ou de séracs nous doublons de nombreuses cordées. Je reconnais les passages descendus la veille avec michel.

5 heures du matin : nous nous asseyons cinq minutes, seuls, au sommet du Mont Maudit, le premier 4000 de la journée. Sous nos yeux nous voyons défiler les caravanes du Mont Blanc pour qui notre sommet n’est qu’un artefact sans intérêt. Après une tentative très bruyante pour vomir mon petit déjeuner nous rejoignons l’autoroute du Mont Blanc. Pris de nausées par un mystérieux mal gastrique je gère comme je peux cette montée au sommet de l’Europe. Un vent violent s’est levé, nous forçant à plonger nos visages dans nos vestes ; la respiration devient difficile. Le sommet qui aurait pu constituer une apothéose se transforme en un lieu inhospitalier. Nous partons vite plein sud pour un aller et retour au Mont-blanc de Courmayeur qui domine le val d’Aoste Italien. Ce lieu a du sens pour nous car il marque l’arrivée de très grands et très difficiles itinéraires qui ont fait rêver des générations d’alpinistes. Quelque part en dessous de nous se cachent cinq sommets de notre liste que nous n’aurons pas pu gravir sur notre route des 4000 à causes des si mauvaises conditions météo de cette année 2007.

10 heures du matin. Après être repassé par le sommet du Mont-blanc nous sommes redescendus par l’itinéraire de la voie normale. Nous profitons en fin d’un moment de répit, au soleil, en terrain plat, avec moins de vent et un peu plus bas en altitude pour reprendre des forces. Le coca cola semble avoir réglé son compte à mes nausées. La forme revient.

Le prochain sommet est un anonyme qui voit chaque été des milliers de personnes passer à  200 mètres de lui sans même un regard. L’arrivée au sommet du Dôme du goûter me fait penser à un voyage sur la lune. La rondeur de ce dôme est presque parfaite, comme un morceau de globe. A un  moment on passe à ce qui doit être le point haut de ce globe. Un fanion agité par le vent, et peut être planté là par Neil Amstrong, nous aide à repérer le vrai sommet. Nous y passons à allure modérée mais sans un arrêt. Bientôt nous descendons l’autre face de ce globe le long d’un méridien imaginaire. Des traces de descente nous rassurent : l’itinéraire vers le cinquième sommet de cette journée, l’Aiguille de Bionassay, a peut être été tracé.

Quelques minutes plus tard quelques idées sombres occupent nos esprits, en passant là ou quatre étudiants grenoblois sont morts de froid et d’épuisement dans une tempête il y a quelques jours…

Peu à peu nous nous engageons sur une arête de neige qui va devenir de plus en plus aérienne pour finir dans une envolée très impressionnante : le lendemain encore je serai habité par des images de ces pentes de neige vertigineuses qui tombent de chaque côté de cette arête de neige instable de 30 centimètres de large sur laquelle nous allons naviguer pendant près de deux heures. Une extrême concentration nous habite. Plus tard dans la vallée nous nous reparlerons du stress durable vécu dans ces passages. Alexis a des gestes très surs. J’apprécie qu’il soit aussi généreux dans ces efforts pour planter solidement son piolet dans la neige et frapper violemment la glace avec ses crampons : il semble vraiment bien en phase avec les éléments. Il me faut juste lui donner quelques conseils pour aller un peu plus vite. Gérer le paradoxe entre sécurité de chaque pas et vitesse de progression n’est pas facile. Mais le mauvais temps annoncé dès le lendemain m‘incite à éviter de traîner dans ces contrées sauvage. A cette heure ci, sur cette arête où maintenant il n’y a presque plus de traces de passage, nous sommes vraiment très engagés. Une deuxième vague d’idées sombres nous a d’ailleurs envahit il y a quelque minutes, en passant près d’une immense corniche de neige dont une partie s’est écroulée il y  a 12 jours, entraînant un père et son fils dans une chute fatale.

Nous sommes donc très soulagés quand nous commençons à perdre de l’altitude et passer enfin sous la barre des 4000 après quelques instants assis en équilibre au sommet de l’Aiguille de Bionassay.

Dans la descente des anciennes griffures laissées par des crampons sur la roche de gneiss me donnent des indices et me permettent de trouver assez facilement les passages cachés. Je me sens en pleine forme et les manœuvres de corde s’enchaînent parfaitement : vitesse et sécurité sont au rendez vous. Je me sens en harmonie avec ce territoire de haute montagne, conscient de savourer les derniers instants de cette route des 4000. La température est maintenant idéale et je sens aussi mon corps idéalement échauffé pour me mouvoir au mieux dans les multiples passages qu’il nous reste encore à franchir.

A huit heures du soir nous posons enfin nos pieds nus sur l’herbe fraîche des alpages de Miages, 3000 mètres plus bas !

Vu depuis les hauteurs de Chamonix, l’itinéraire assez fantastique de cette très longue journée est impressionnant.

Il trace un immense trait qui part à l’Est de l’Aiguille du midi, franchit tous les 4000 visibles et se termine loin vers l’Ouest par Bionassay.

Comme un immense trait qui vient souligner la signature d’un magnifique projet.

Comme un immense trait à l’image du sourire apaisé de mon compagnon du jour ; pour Alexis le rêve est devenu brutalement une réalité. Dans la même journée il a dépassé les 4000 mètres pour la première fois, il a enchaîné 5 sommet à plus de 4000, il m’a guidé lors de ma montée maladive du matin, il  a foulé le sommet du Mont Blanc symbolique et il a franchit en tête des passages de neige d’un niveau technique encore jamais vécu par lui. J’ai une pensée pour son père Guillaume qui fut un cordial compagnon de cordée. Je recevrais plus tard dans la soirée, avec plaisir, un message de félicitation de son oncle Christophe Profit, alpiniste si humble et si brillant.

Comme un immense trait qui marque le passage d’une génération à l’autre.

A vous de jouer les gamins !

Grenoble, le 8 aout 20007...sous la pluie une fois de plus

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30 juillet 2007

28 juillet : 56 sommets

Il est 7h30 dans ce matin gris. Je me sens perdu, quelque part sous les 4000 m, sur une petite vire d'une paroi vraiment très austère.

Je viens de gravir  50 mètres d’escalade sur des dalles de granit recouvertes de verglas. Du dernier relais je suis monté vers la droite comme l’indiquait notre topo guide. Devant moi aucun signe de passages humains antérieurs. Sur ma droite je devine, malgré les nuages gris, un grand vide de plusieurs centaines de mètres. Au dessus aucun passage facile. Le temps est maussade, mon humeur aussi ; je crois que nous avons fait une erreur d’itinéraire et que nous allons devoir redescendre. Le temps perdu va-t-il nous empêcher de gravir aujourd’hui les 5 sommets des Grandes Jorasses ?

La journée d’hier avait poutant été magnifique. Depuis le haut du téléphérique de Torino (Italie) nous avons rapidement gravi la pittoresque Dent du Géant puis chevauché les célèbres et esthétiques arêtes de Rochefort en franchissant les sommets de l’Aiguille de Rochefort et du Dôme de Rochefort. Deux descentes en rappel nous ont ensuite déposés au col de Grandes Jorasses où nous attendait la cabane Canzio ;un demi tonneau métallique avec matelas et couvertures pour passer la nuit à 3800 mètres d’altitude. Deux jeunes autrichiens y somnolaient déjà ; une musique sympa et insolite en ces lieux s’échappait des mini enceintes reliées à leur i.pod.

Le lendemain, ce 28 juillet vers 8h30 (jour des 47 ans de Michel qui décidemment aura toujours 13 mois de retard sur moi !) nous voici donc à nouveau sur le bon itinéraire après quelques égarements et quelques manœuvres de cordes délicates.

Les deux premiers sommets de la journée se nomment Pointe Young et pointe Margherita.

Toute cette journée se déroule dorénavant sur la très aérienne arête de grandes Jorasses ; agrippés à des feuillets de granit de quelques dizaines de centimètres d’épaisseur nous devinons sur notre gauche les 1000 mètres d’a pic de la célèbre face nord et sur notre droite ce sont plus de deux milles mètres de vide qui attirent parfois notre regard jusque dans la paisible vallée du Val ferret, célèbre pour ses polenta et sa grappa.

Mais pour l’instant restons concentrés ; le vent, le brouillard et la longueur de l’itinéraire nous obligent à grimper vite tout en respectant toutes les actions de sécurité possibles.

Vers treize heures, au sommet de la pointe Croz, nous trouvons enfin un espace assez confortable pour poser le sac et nous restaurer ; le reste de l’itinéraire est maintenant plus facile. Malgré la météo menaçante nous savons maintenant que nos objectifs de la journée seront atteints et que le retour vers la vallée ne devrait pas poser de problème. Nous franchissons donc la pointe Wymper puis atteignons le cinquième sommet de la journée, la pointe Walker. Malgré notre expérience nous ressentons une impression particulière sur ce sommet mythique qui a vu tant de grands moments d’alpinisme, de réussites, de drames, de sauvetages héroïques. Je me penche délicatement au dessus de la face nord noyée dans les nuages gris en pensant à René Desmaison qui y  accomplit des exploits incroyables. Dans son livre « 342 heures dans les grandes Jorasses », je découvris adolescent son ascension hivernale. Une pensée aussi pour deux de ses sauveteurs de ce mois de février 1971 : Alain Frébault qui, le premier, réussit à poser son hélicoptère au sommet de cette montagne et le guide Gérard devouassoux qui se fit treuiller en pleine face pour aller chercher la cordée en perdition.

Revenons à juillet 2007 : nous nous engageons maintenant plein sud dans les pentes qui vont nous ramener hors de la haute altitude et de ses zones « à risques ». Malgré des masses de neige molles où nous enfonçons jusqu’aux cuisses, malgré le brouillard et malgré la fatigue nous nous rapprochons peu à peu du bas de la paroi.

Et c’est en une longue glissade sur les fesses que nous rejoignons enfin les premiers rochers qui marquent la fin des dangers ; plus de crevasses sournoises, plus de séracs menaçants, plus de parois de rochers branlants au dessus de nos têtes. Nous nous décordons, rangeons nos sacs, reprenons une allure à peu près convenable et rejoignons le refuge Bocalate puis la fameuse vallée Polenta y  Grappa.

( photos dans l'album en haut à droite)

26 juillet 2007

Bouquet final ??!!??!!??!!...

Comme le dit très bien Pascal dans son commentaire du message précédent, notre prochaine sortie est peut être le bouquet final de ce projet de parcourir la route des 4000

Voici où nous serons ces vendredi et samedi avec, à la clé, peut être 8 sommets de plus :

jorasses_alpimages

Meri encore à Grenoble Ecole de Management de nous avoir aidé matériellement pour mener ce projet

16 juillet 2007

15 juillet : trilogie à la Verte : 48 sommets au compteur

En ce temps de vacances d'été je me permets un texte plus long pour faire concurrence à vos sudocou, mots croisés ou autres romans d'été. En guise de devoirs d'été vous pouvez aussi traquer les fotes d'orthographe

Minuit ,l'heure du crime.

Ma montre réveil vient de m'agresser sauvagement alors que je dormais paisiblement dans un des dortoirs du refuge du Couvercle. Je rejoins la salle à manger et croise des regards pas tibulaires mais presque. Si j'ai la même tête que ces quelques alpinistes déjà levés, le spectacle ne doit pas être beau à voir. Sur une table 3 verres vides témoignent d'une soirée génépy qui a du se finir il y a quelques minutes pour des veinards qui, eux, démarrent leur nuit de sommeil maintenant. Deux guides de Cham avec leurs clients, deux cordées d'Italiens et notre cordée de la route des 4000 : nous sommes 10 à nous préparer pour gravir l'Aiguille Verte par le couloir Wymper. Vues les conditions météo de cette année ( se reporter aux trentes six chapitres précédents !), cette ascension n'a pas été faite depuis très longtemps. Aussi, en (presque) vieux guides avisés nous trainons au petit déjeuner pour laisser les autres commencer à faire la trace sur le glacier. Nous prendrons ensuite le relais pour tracer dans la paroi. Nous devons en effet garder de l'énergie, car pour nous ce sommet ne sera que le premier d'un enchainement de trois avec l'Aiguille de la Grande Rocheuse et celle du Jardin.

Etrange cette ambiance de veillée d'arme à minuit trente ( l'expression même, à cette heure ci, est troublante) : les guides sont lents, silencieux, profitant encore des quelques instants de lumière et de civilisation, mais dans les têtes le combat est déjà là, l'agressivité prête à être dégainée, les sens prêts à se mettre en action; dehors, dans quelques instants, à deux pas du refuge protecteur, ce sera l'action, les agressions des vents de la nuit, la vigilance entre les crevasses, l'effort à rythme soutenu pour finir la course avant que le soleil ne rende la montagne trop dangereuse.

Trois heures du matin. Partis les derniers nous avons profité des traces puis peu à peu avons doublé toutes les cordées. Les jets de lumière de nos lampes frontales dressent un décor austère : les masses sombres des blocs de granits, les reliefs de traces d'avalanche, les frêles silhouettes des alpinistes au dessous de nous, les pentes de neige et glace raides qui s'élèvent bien au dessus de la limite de notre vue, pour finir très loin, sept cent mètres plus haut.

Quatre heures du matin. Nous progressons à corde tendue avec Michel quarante mètres au dessus de moi. Malgré la concentration sur mes gestes et l'effort à gérer, une idée me trote dans le tête depuis quelques minutes. "Michel, le couloir il est à gauche, on s'est trompé !" Ah ouais, bon ben on y va ! Lui aussi commençait à avoir des doutes et c'est pourquoi sa réaction est si rapide. Il y a tellement de neige cette année que, en absence de traces, nous avons emprunté un couloir secondaire qui mène à un cul de sac. J'entame alors une longue traversée de cent mètres au dessus du vide, toujours en pleine nuit, en passant de plaques de granit en plaques de neige gelée. J'arrive à placer notre corde dans quelques points d'assurance naturelle. Au dessous de nous, toute une série de points lumineux jettent des rayons dans notre direction : même les guides qui "tournent" souvent dans ce secteur nous on suivi dans cette impasse et observent notre traversée pour nous imiter !

Cinq heure trente. La lame affutée de mes nouveaux crampons Simond réfléchit le premier rayon du soleil au moment où je me dresse au sommet de l'Aiguille Verte, ma montagne préférée. Les lointains rayons venus de l'est mettent alors en beauté tout notre environnement jusqu'à la couleur de nos vestes. Tout le massif du Montblanc se révèle à nous dans un 360° majestueux que seule le sommet de l'Aiguille Verte peut offrir du fait de sa position centrale et isolée dans le massif: le scénario est parfait !

Enfin presque parfait : en effet, le petit déjeuner que j'ai fait trainer en longueur tout à l'heure manifeste son mécontentement d'une nuit si brutale et me jette à terre. Un petit vomito au sommet et je me sens déjà à nouveau en pleine forme, prêt pour démarrer une des plus belles traversées alpines, vers la Grande Rocheuse.

Nous passerons ainsi quatre heures à chevaucher un décor de rêve entre deux à pics de plus de 700 mètres de haut : tours de granit dorées, corniches de neige ourlées par les vents, fines arêtes de neige qui ne laissent la place que pour un seul de nos crampons et nous obligent à pratiquer le funambulisme, dédales de blocs de roches où il nous faut nous contorsionner. Les conditions sont encore hivernales en cette mi juillet; nous sommes seuls sur le fil des 4000; aucune trace autour de nous. Michel se transforme en bagnard de luxe pour dégager de grandes quantités de neige plaquée et collée sur le rocher par les effets conjugués du vent tempetueux et des écarts de température. Enfin, un dernier pas d'escalade technique en crampons sur de fins cristaux de granit nous mène au dernier sommet de la journée : l'Aiguille du Jardin. Elle porte bien son nom, en plein milieu de ce fantastique décor que nous offre la nature. Même dans ses derniers centimètres d'escalade elle nous offre ses généreux cristaux de quartz, de micas et de feldspath, les trois minéraux qui constituent le granit; granit qu'on appelle ici protogine; un granit venu d'un profond magma puis qui a royalement pris son temps pour émerger, refroidir et tailler ces gros grains cristallins.

Nous prenons le temps de savourer ces instants de beauté, d'harmonie et de plaisir de la haute altitude. Depuis début avril nous avons réussit 100% des sommets tentés. Même si notre projet est remis en question du fait de la météo déplorable, nous sommes conscients de vivre des moments rares. Le prix à payer est en effet élevé : laisser les siens dans la vallée, fournir tant de longs efforts, naviguer en zone de risque...pour retrouver à chaque fois un plaisir intact et des joies adolescentes. Ce parcours, je l'avais en stock de projets depuis très longtemps, je viens d'y passer quelques heures et, à 48 ans, j'ai conscience que je n'aurais sans doute pas l'occasion d'y repasser un jour. Rêves fugaces, rêves furtifs, rêves futiles...mais rêves sûrement "utiles" omme disait l'autre ( L.....T....)

Mais déjà, depuis quelques instants, nous avons aussi en tête, aux côtés de la joie, le soucis de la descente ; sous nos yeux un couloir de neige et glace de 700 mètres dévale en un immense toboggan jusque vers le refuge de ce matin. Contrairement aux affirmations d'un vieux guide croisé quelques jours plus tôt nous ne trouverons aucune cordelette dans ce couloir pour descendre en rappel en y placant notre corde en double. Soit le guide était trop vieux et les cordelettes disparues depuis longtemps (joke !) soit les volumes de neige accumulés nous auront caché ces points d'assurance si réconfortants. En très grande concentration nous redescendons ce couloir parfois le long de notre corde placée autour d'un petit bloc de roche dépassant de la neige, parfois en désescalade non assurés. Un saut de trois mètres par dessus la rimaye qui forme une dernière crevasse avant le glacier marque enfin pour nous la fin de la zone de risque. Soulagement !

Il est 14 heures lorsque je me réveille avec un coup de soleil aux cuisses sur la terrasse du refuge. Ai-je rêvé de cette course ? Non, mes habits à sécher me rapellent que je viens de me payer une petite sieste après 3 sommets de 4000m et avant de redescendre dans la vallée.

Il me faut désormais emprunter le joli sentier de la veille, descendre les 150 mètres d'échelles métalliques qui permettent de rejoindre le glacier (réchauffement climatique oblige !), allonger le pas sur la mer de glace en résistant aux appels des petits lacs d'eau gelée qui la parsème, m'engouffrer dans le train du Montenvers bondés de touristes en tous genres.

Dans une chaleur assourdissante le train nous déverse sur le macadam de Chamonix. Dans les rues les bouchons automobiles s'allongent et les jupes des anglaises raccourcissent; la grande kermesse de juillet bat déjà son plein !

Prévision météo pour la semaine: nuages, nuages, orages, orages, oh rage, oh desespoir !

14 juillet 2007

14 juillet

Ce soir nous regarderons les feux d'artifice de Chamonix depuis le refuge du Couvercle. La semaine passée, malgré le beau temps, nous étions dans les gorges du Verdon pour de l'escalade sur le magnifique calcaire, du vélo dans la garigue, du vin rouge dans les verres et des tarines beurre/miel sur un des meilleurs pains du monde ( village de Trigance).

La montagne était encore trop dangereuse pour les itinéraires visés.

Demain 15 juillet nous devrions gravir l'Aiguille Verte et deux autres sommets proches. "Au sommet de la Verte tu deviens vraiment alpiniste", disait le fameux professeur guide Armand Charlet au milieu du XX ème siècle. En effet cette montagne ne présente aucun itinéraire facile.

Personnellement c'est ma montragne préférée : elle est isolée de toutes les autres. Les trois ingrédients de base des paysages d'altitude y sont représentés avec générosité : faces rocheuses, parois de glace et domes de neige. Le soir, cette montagne passe par toutes les teintes avec les derniers rayons du soleil. Enfin la Verte se dresse pile en face du chalet où j'ai passé mon enfance. Quelques millimètres de mes rétines ont sans doute définitivement mémorisé ses formes.

Déjà mercredi se profile une nouvelle perturbation météo...

6 juillet 2007

Dans la vallée ... sous le ciel bleu

Malgré le ciel bleu et 48 h de beau temps exceptionnellement consentis par les dieux de la météo, nous resterons dans la vallée à cause des dangers d'avalanches top élevés. Les gardiens de refuge contactés nous ont fortement découragés de monter leur rendre visite !

j'en profite pour vous présenter une carte générale de notre périple. Nos sommets convoités se situent dans 7 régions. Le valais concentre le maximum de sommets, devant le massif du Montblanc.

A ce jour il nous reste :

- 2 sommets en oberland

- 8 sommets dans le Valais

- et 25 dans le massif du Montblanc !!

circuit_Alpes

Avec cette météo incroyablement mauvaise je sens qu'il va falloir encore "bosser" sur ce projet à l'automne après le break prévu en d'aout. Pourquoi pas ? C'est joli aussi à cette époque !

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Sur la route des 4000
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